Que faire pour véritablement protéger le salarié "protégé" extérieur à l'entreprise ?

30 janvier 2019
Dans un arrêt de rejet du 16 janvier 2019 PB (n° 17-27685 ci-joint) les fées du quai de l'horloge se sont penchées pour la première fois sur le berceau du Défenseur syndical mais, peu attendries par le bel enfant holando-macronien, elles maintiennent leur curieuse idée selon laquelle"il appartient au salarié qui se prévaut du statut protecteur lié à un mandat extérieur à l’entreprise d'établir qu'il a informé son employeur de l'existence de ce mandat au plus tard avant la notification de l'acte de rupture, ou que celui-ci en avait connaissance". 
 
Et la très très haute cour de poursuivre  "la cour d’appel, qui a constaté que le salarié n’avait pas informé son employeur de son mandat de défenseur syndical, et qu’il n’était pas établi que l’employeur en ait été informé, au jour de la notification de la rupture de la période d’essai, par la Direccte, a statué à bon droit".

Tout cela est bel et bon, mais ça veut quand même dire qu'un salarié "protégé" extérieur à l'entreprise (Défenseur syndical, Conseiller du salarié, etc....) est obligé de dévoiler son statut à son employeur pendant une période d'essai ou pendant le cours d'un contrat précaire, et plutôt dès le début (voir même juste après signature du contrat ou réception de la lettre d'embauche ou de la promesse d'embauche), car il sera rarement prévenu de l'intention de rupture de l'employeur. 

La cour de cassation suggère donc implicitement aux syndicalistes nouvellement embauchés de prendre quelques précautions lesquelles pourraient pourtantlaisser supposer au patron une certaine défiance de la part de son subordonné, voir lui sembler offensantes (réflexion bien incorrecte inspirée de Victor Cherbuliez dans Samuel Brohl et compagnie).

En fait dans toutes les situations où l'employeur peut rompre un contrat de travail sans agiter préalablement le moindre signe de sa décision (pas de nécessité d'un entretien préalable par exemple), il y a danger grave pour le salarié détenteur d'un mandat extérieur. 

Ceci vaut aussi pour un CDI car un employeur malicieux peut très bien licencier un salarié "protégé" extérieur sans tenir d'entretien préalable et en l'état de la loi et de la jurisprudence il n'encourt qu'une sanction financière symbolique. 

Le législateur serait donc bien avisé de tenir compte de cette curieuse position de la chambre sociale qui n'ouvre aucune solution de "rattrapage" au salarié protégé extérieur en cas de rupture "surprise". Il suffit de s'inspirer du régime du licenciement de la femme enceinte qui dispose d'un délai de 15 jours pour informer son employeur de sa situation particulière afin d'obtenir la nullité de la rupture. Chacun y trouverait son compte et la justice serait sauvegardée.

On conseillera par ailleurs au salarié "protégé" extérieur désireux de démissionner ou de prendre acte de la rupture de son contrat de travail, de prendre la précaution (mère de sûreté comme chacun sait et qui va mieux en couple) d'informer juste avant l'employeur de l'existence du mandat.