L'on sait que lorsque un employeur prononce un licenciement pour faute lourde, l'art. L 3141-26 CT lui permet de s'accaparer les droits à congés payés du salarié de l'année en cours, alors qu'en cas de faute grave l'indemnité compensatrice de congés payés est due.
La Cour de cassation vient, à juste raison, de renvoyer une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) au Conseil constitutionnel sur cette question qui mérite effectivement d'être remise sur "le métier".
Il s'agit en effet d'une sorte de compensation légale qui choque l'intelligence, car elle vise à punir le salarié d'avoir voulu prétendument nuire à l'employeur en indemnisant ce dernier de façon forfaitaire sans jugement et donc sans constatation et évaluation d'un préjudice.
Un véritable OJNI (objet juridique non identifié), comparable à l'indemnité forfaitaire d'origine prétorienne équivalente au préavis due à l'employeur par un salarié démissionnaire qui refuse d'effectuer son préavis. Le Conseil dispose de 3 mois pour statuer.
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Arrêt n° 2247 du 2 décembre 2015 (15-19.597) - Cour de cassation - Chambre sociale - ECLI:FR:CCASS:2015:SO02247
Renvoi
Demandeur(s) : M. Michel X...
Défendeur(s) : la société Subrini et compagnie
Attendu qu’à l’occasion du pourvoi formé contre l’arrêt rendu le 18 mars 2015 par la cour d’appel de Bastia, M. X... a, par mémoire distinct et motivé, demandé à la Cour de cassation de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité suivante :
« L’alinéa 2 de l’article L. 3141-26 du code du travail prévoyant que l’indemnité compensatrice du droit acquis aux congés est due sauf en cas de licenciement pour faute lourde est-il contraire à "l’article 11" du préambule de la Constitution de 1946 disposant que la Nation garantit à tous, notamment à l’enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs ? »
Attendu que la disposition contestée est applicable au litige, lequel concerne notamment le droit à indemnité compensatrice de congés payés réclamée par le salarié ;
Qu’elle n’a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel ;
Que la question posée présente un caractère sérieux en ce que l’article L. 3141-26, alinéa 2, du code du travail prévoit un cas de perte de jours de congés payés sans lien avec les règles d’acquisition ou d’exercice de ces droits au repos ;
D’où il suit qu’il y a lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel ;
PAR CES MOTIFS :
RENVOIE au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;
Président : M. Frouin
Rapporteur : M. Flores, conseiller référendaire
Avocat général : M. Liffran
Avocat(s) : SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin ; SCP Spinosi et Sureau